
Cet article est le troisième de ma série d'articles où je vous présente les étapes de l'étude que j'ai menée avec mon équipe ces derniers mois. Tous les articles concernant cette étude sont disponibles avec le mot clé "Mobilité urbaine".
Grâce à ma première expérience de guidage j'ai pu commencer à formaliser un protocole de recherche. Le protocole de recherche est une étape indispensable puisqu'il permet de montrer que notre étude est reproductible et, par extension de garantir la validité de nos résultats. En effet, la reproductibilité d'une étude permet à n'importe qui de la reproduire afin d'aboutir aux mêmes résultats. Le protocole de recherche est composé de plusieurs éléments : un titre, un contexte/échantillon, une question, des objectifs, un déroulement, une explication de l'analyse des données et un plan de recherche (calendrier). La mise en place d'un protocole est une méthode itérative. C'est-à-dire que j'ai réalisé de nombreux tests pour arriver à un protocole final. Heureusement, l'aide d'Aurélien m'a permis de ne pas perdre trop de temps !
Notre protocole d'étude
Contexte et échantillon
Nous nous sommes intéressés au guidage dans les transports en communs. Notre champ d'étude couvre principalement les réseaux de transports en commun lyonnais et parisien. Pour recruter des participants, nous avons fait un appel à recrutement via Twitter et notre blog et nous en avons parlé autour de nous. En deux semaines, nous avons recruté une dizaine de personnes : 8 à Lyon et 3 à Paris. L’âge de nos participants va de 24 à 43 ans avec une moyenne à 30 ans. Au moment du recrutement, je demandais aux participants leur mode de transport habituel. Je leur demandais aussi de noter sur 10 leur connaissance de la ville ainsi que leur connaissance du réseau de transport. Sur les 11 participants, 6 ont l’habitude d’utiliser les transports en commun au quotidien, 3 utilisent le vélo et 2 la marche. Leur connaissance de la ville et des transports en commun est plutôt bonne puisqu'ils ont tous donné une note entre 6 et 9 sur 10.
Questions et objectifs
J'ai déjà parlé de mes objectifs dans le premier article de ma série. Pour rappel, les voici :
- Clarifier les moments où l'usager a besoin d'informations ainsi que la nature de ces informations
- Comprendre comment aider l'usager dans ces moments charnières
- Identifier les problèmes qu'il peut rencontrer
- Concevoir une application mobile de guidage pour les transports en commun, en se basant sur ces observations
La documentation
La documentation concerne toutes les traces que je vais conserver de l’étude. Elle peut donc se composer de nombreux types de documents : vidéo, photo, enregistrement, capture d’écran, réponses à un questionnaire, etc. La documentation est une étape indispensable dans la mise en place d’une étude car elle permet à la fois d’enregistrer des éléments que je n’aurais pas remarqués pendant l’étude mais aussi elle lui permet de pouvoir revenir sur les enregistrements après l’étude si d’autres questions émergent. Dans notre cas, la documentation se faisait grâce à trois enregistrements :
- l’utilisation de lunettes-caméra pour un enregistrement vidéo de ce que regardait le ou la participante
- l’utilisation d’un dictaphone et d’un micro-cravate pour enregistrer ses réflexions
- l’utilisation d’une application pour enregistrer l’écran du smartphone

Déroulement
Accueil du participant
Tout d’abord j'accueillais le ou la participante présentant le projet M2i et les objectifs de notre étude. Je lui expliquais ensuite le déroulement de l'observation et notre documentation. Pour conclure ces explications, je lui faisais compléter une fiche de renseignements et de consentement. Je parlerais plus longuement de l'aspect législation d'une telle étude dans un prochain article. Pour finir, je lui donnais sa destination.
Choix de la destination
Selon le point de départ nous avons choisi plusieurs destinations possibles. Le choix des destinations s'est fait autour de plusieurs motivations :
- La destination est située à moins de 30 minutes du point de départ. En effet, nous nous intéressons surtout aux moments charnières et nous essayons de limiter le temps passé dans un même transport. De plus, nous ne voulons pas demander trop de temps aux participants.
- Les trois quarts des trajets impliquent une correspondance. La correspondance est un moment charnière qui nous intéresse beaucoup et nous voulons observer comment le participant fait pour s’orienter entre deux transports.
- Les trajets que nous avons choisis couvrent les principaux modes de transports en commun : tram, métro et bus.
- Enfin, toutes nos destinations sont des points d'intérêts qui méritent le détour, elle ne sont pas accessibles directement via un arrêt ou une station et demandent un minimum de marche pour les atteindre. Au-delà de l’étude, ces destinations forment un but intéressant pour le participant: musée, fontaine, monument, etc.
Le trajet
Après avoir mis en place les outils de documentation (lunettes-caméra, micro-cravate, enregistrement de l’écran du smartphone) (attention à bien démarrer tous les enregistrements et surveiller que le participant ne les arrête pas en cours d'expérience)(oui, c'est du vécu !), je suivais le ou la participante dans son trajet. J'essayais de faire en sorte qu'il ou elle se sente bien en lui posant des questions sur ses trajets habituels et ses habitudes. En cas d'hésitation je lui posais des questions pour qu'il ou elle verbalise ses questionnements.
Cependant nous avons remarqué que, du fait de ma présence, les participants n’agissaient pas forcément comme à leur habitude. Par exemple, trois de nos participants sont restés debout dans le transport alors qu’habituellement ils cherchent à s’assoir. C'est pourquoi, avec une de nos participantes nous avons testé un parcours non-accompagné.
Trajet accompagné versus trajet non-accompagné
Dans ce cas, les étapes du protocole sont les mêmes. La seule différence est que je ne restais pas avec la participante pendant le trajet. La première grosse différence que j'ai vue entre le trajet accompagné et le trajet non-accompagné concerne le stress. Seule, la participante était beaucoup plus calme et a pris plus de temps lors du choix de son trajet. J'imagine que ma présence lui mettait une pression supplémentaire et que la peur de se tromper était bien plus présente. Pendant le trajet, la participante a pu utiliser son téléphone pour écrire des messages, écouter un podcast et planifier sa soirée... Choses qu'on ne fait pas lorsqu'on est accompagné. Concernant la manière de s'orienter pour aller à un arrêt ou aller à sa destination j'ai retrouvé les mêmes stratégies.
L'arrivée
Lorsque le participant avait atteint la destination demandée, je lui demandais s’il avait des remarques ou des questions. Pour finir je lui donnais une gratification matérielle pour le remercier.